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Équipeur, une passion qui perdure

Voilà plus de trente ans que je passe des journées pendues à mes cordes statiques dans les falaises les plus sauvages d’ici et d’ailleurs. J’ai connu tous les stades de l’évolution de l’équipement et même à certains moments fait bouger un peu les lignes. Je fais partie encore de cette génération qui a commencé à équiper par le bas, avec pitons divers, sangles, coins de bois et autres quincailleries diverses. C’était l’époque d’exploration et d’ouverture des grandes lignes de faiblesses, fissures, dièdres, cheminées … On côtoyait bien aussi les dalles compactes, les grands piliers où quelques audacieux et talentueux tentaient de s’aventurer, mais la protection y était pratiquement impossible ou des plus aléatoire. Alors que le niveau commençait à vraiment progresser il fallait trouver le matériel adéquat pour explorer ces nouveaux terrains verticaux. Quoi de mieux que les matériaux utilisés dans le bâtiment pour tenter l’aventure. C’est ainsi que l’on commença à faire des essais avec les premières chevilles à expanser et les spits de diamètre 8. Ce nouveau matériel ouvrait de nouveaux horizons pour l’équipement, mais n’est resté pendant plusieurs années utilisé que temporairement en complément des pitons. Pour ma part après avoir découvert les murs compacts et verticaux de Mouriès dans les Alpilles, je décidais d’utiliser uniquement cette méthode et ce matériel pour commencer à équiper ce site. Au bout de six mois plus de 50 voies étaient équipées et on pouvait enfin grimper sans craindre la chute.

Ce fut une véritable révolution, qui entraina très rapidement une sur fréquentation du site et quelques problèmes avec le voisinage. Mais la machine était lancée et de partout, les équipeurs allaient prospecter et ouvrir de nouveaux sites. Rapidement on se rendit compte que les spits de 8 mm étaient un peu légers et que dans certains types de rocher (dans la molasse par exemple) ils n’offraient aucune sécurité. C’est ainsi que l’on passa à des diamètres plus gros, 10 mm, et que l’on expérimenta d’autres types de chevilles comme celles à double expansion utilisées aussi dans le bâtiment. La falaise de Bioux avec sa molasse tendre fut un peu le laboratoire de ces matériaux divers. C’est là aussi que pour la première fois Laurent Jacob et moi-même avons abandonné le tamponnoir pour percer les trous avec un vilebrequin. J’essayais également à la falaise de l’Aiguebrun les premiers scellements chimiques en ouvrant Schabadaswing. Marc Troussier et Philippe Macle en faisaient de même aux falaises des confines.

Que de chemins ou plutôt de longueurs parcourues dans cette première décennie depuis les vieilles cornières de bois et les pitons artisanaux. Des centaines de nouveaux sites avaient vu le jours dans toutes les régions, des sites dont je fus le premier à assurer la direction avec Daniel Taupin. L’escalade moderne était en plein boom avec la création de la FFME et de sa première commission. La création de la FFME accompagna les premières vraies réflexions sur l’aménagement des sites, sur le matériel ainsi que les premiers tests pour comparer le matériel, leur solidité et leur résistance à l’arrachement et au cisaillement. L’escalade se démocratisait, de plus en plus de pratiquants fréquentaient ces sites. On entrait dans le début de l’aseptisation des voies. Les grandes marques de matériels de grimpe, après étude et répondant aux normes UIAA, proposaient une gamme de matériel adéquat pour tous types et qualité de rocher (goujons et broches à sceller…). Enfin l’avènement des perceuses à accus offraient un nouveau confort pour l’équipeur.

Serge Jaulin toujours avec sa perceuse !

Je poursuivais ma passion de la grimpe en suivant cette évolution et c’est avec l’aide du Vieux Campeur, en collaboration avec Philippe Charrousset (actuel acheteur matériel d’escalade), que je proposais l’équipement d’une falaise de niveau moyen et d’initiation dans les Alpilles à Aureille. Six mois plus tard la falaise du Vieux Campeur était opérationnelle avec 100 voies équipées !

Jamais cette passion d’équiper ne m’a quitté. J’ai eu la chance de pouvoir assouvir celle-ci sur les rochers et falaises les plus diverses, dans de nombreuses régions de France, mais aussi à l’étranger, dans les difficultés les plus variées du 4 au 8 B en fonction de mon niveau du moment. Aujourd’hui je continue toujours avec autant d’enthousiasme. Je suis toujours aussi motivé, pour chercher, découvrir de nouveaux lieux. J’aime ce moment où après avoir repéré, je lance ma corde dans une face vierge. Ce moment où je descends pour la première fois dans cette face, cette première rencontre avec l’architecture et les sculptures du lieu. Les premiers nettoyages, les premières purges. Progressivement les premières lignes se dessinent, je commence à les imaginer, bientôt avec ma perceuse je vais commencer à les écrire. Pour moi équiper et ouvrir une voie, c’est un peu le plaisir de dessiner un chemin plus ou moins facile, donner un cap pour faire partager l’itinéraire, c’est un peu le même plaisir que je ressens quand je trace le parcours d’un trail (Serge organise également depuis plusieurs années le trail du Ventoux). En définitive, équiper et ouvrir une voie d’escalade ce n’est que tracer un parcours plus vertical. C’est une pratique des plus enrichissante qui complète la passion de l’escalade, c’est pour cela que je suggère à tou grimpeur d’équiper un jour.

Ainsi, modestement je me permets de vous donner quelques conseils pour commencer et vous présenter le matériel de base nécessaire.

Serge Jaulin

Carnet Pratique

LES DIFFERENTES ETAPES POUR EQUIPER UNE VOIE

  1. Repérage de la ligne depuis le bas
  2. Pose de sa corde semi-statique et descente pour vérifier la qualité du rocher et faire les premiers gros nettoyages et purge (matériel nécessaire en plus de baudrier, descendeur et auto bloquant : corde statique longueur appropriée, marteau, scie, sécateur, barre à mine…)
  3. Perçage et pose des points d’assurance et relais (matériel : goujons de préférence 12mm ou tige à sceller suivant la qualité et type de rocher, perceuse à accus ou thermique, marteau, clef pour serrage des goujons, soufflette et petit goupillon pour nettoyage du trou après perforation, résine pour scellement, brosse métallique, chaines de relais…). Plusieurs perceuses conseillées : Hilti TE 2 A, moi j’utilise Hitachi DH 18 DL (grosse autonomie))
  4. Brossage final (brosse métallique et brosses souples et soufflette)
  5. Ouverture de la voie première ascension marquage du nom…

CONSEILS

Tester la qualité du rocher

Pour tester la qualité du rocher, utiliser le marteau et écouter la résonnance (pour savoir si ça sonne creux ou pas) ne jamais mettre un point à un endroit qui sonne creux, soit purger l’endroit jusqu’à retrouver une couche saine soit choisir un autre endroit .

Choix du type d’ancrage

Il dépend avant tout du type de roche.

A) Si le rocher est très compact et de bonne qualité, alors des goujons seront suffisants (choisir de préférence des goujons de 12 mm en inox plus résistants à la corrosion avec les plaquettes, plusieurs marques les proposent, Petzl ou Bolt, que vous trouverez dans les magasins Vieux Campeur aux rayons spécifiques avec les conseils avisés des vendeurs).

Perçage diamètre 12, la profondeur dépend de la longueur du goujon choisi entre 9 et 12 cm.

B) Si la roche est tendre ou de type poudingue.  Broches de scellement inox 10 mm de diamètre plus ou moins longues en fonction de la densité du rocher, percage à 12 cm profondeur. Ou broches FFME cosiroc diamètre 12,5 mm perçage à 14 mm. Là aussi vous trouverez différentes broches à sceller Au vieux Campeur.

Plusieurs résines existent : Wurth Wit -VE 200 Hilti RE 200 Sika Anchorfix3 ….

Pose des relais

A faire vraiment en dernier ….

En fonction du type de rocher, là aussi, utiliser des goujons ou des broches à sceller. Les deux points distants de 20cm seront reliés par une chaine à maillons ou une  chaîne de relais toute prête (Fixe, Petzl …). 

Quelle distance entre les points ?

Même si la tendance actuelle est plutôt de rapprocher les points, environ tous les 2 mètres, il n’y a aucune obligation. La seule règle que moi je respecte absolument et de faire en sorte qu’aucune chute ne soit dangereuse, que le point soit placé de façon qu’en cas de chute le grimpeur ne tombe pas sur une vire ou au sol.  Cet espacement est souvent la marque de fabrique et la signature de l’ouvreur.

Percer et fixer ou sceller

En fonction de l’ancrage choisi on perce au diamètre prévu. Une fois le trou percé, quel que soit l’ancrage, il faut nettoyer le trou de toute poussière, pour cela il est pratique d’utiliser une soufflette et on termine avec un petit goupillon. Une fois le trou propre on peut mettre le goujon en tapant avec le marteau avant de serrer. Pour la broche on remplit le trou de résine à l’aide d’un pistolet et ensuite on introduit la broche et on nettoie les bavures.

Matériel complémentaire optionnel

  1. Sika dur 31 afin de consolider certaines prises qui peuvent être un peu fragiles ou fissurées, utiliser du SiKa 31 avec ses deux composants
  2. Barre à mine pour faire des purges importantes
  3. Paires de gants chantier  pour se protéger
  4. Trousse secours

Voilà les quelques modestes conseils que je peux vous donner, fruit de quelques dizaines d’années d’équipement soutenu, aidé et accompagné par le Vieux Campeur, qui me permet encore pour cet été de vous proposer sur le mont du Vaucluse un nouveau secteur avec une dizaine de voies à l’ombre jusqu’à 14 heures du 6 au 7 c.

Bonne grimpe !

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